Le soleil n’est pas le seul à réussir ses mirages. Le brouillard s’affirme non moins bon magicien, qui métamorphose en novembre anglais un juillet suisse. Ainsi, le grand sanatorium, maître de la tempête géologique, en parfait équilibre au sommet d’une vague rocheuse, ce bâtiment, dont les balcons gréés de stores et l’impeccable majesté fraîche repeinte, déjà, par plein beau temps, incarnaient, de la caravelle au transatlantique, l’idée générale de navire, a su profiter de cette brume pour devenir plus et mieux que symbole et entreprendre un voyage parmi les énigmes, non de montagne, mais de mer du Nord. Ainsi se perd jusqu’à la notion de continent. Nul n’ose plus imaginer, en frontières au désert liquide, ces plages, qui seules apaisent les pieds de l’inquiétude. La prison de vapeur polaire, le bagne d’opaque ennui, qui donc tenterait d’en escalader les murailles ? Pas un optimisme n’est assez vigoureux pour espérer une île même encerclée de Gulf-Stream négatif et frissonnante à l’i
Par T. de Wyzewa. C’est M. Émile Montégut qui, en même temps qu’il révélait au public français la vie et le génie de Charlotte Brontë, a le premier cité en France le nom d’Emily Brontë, la sœur cadette de l’auteur de Jane Eyre. Voici comme il parlait d’elle, en 1847, dans un article de la Revue des deux Mondes : "Cette singulière personne, devant laquelle son énergique sœur tremblait elle-même, est morte prématurément. Son talent naturel n’a pas eu le temps de se développer, mais il était plus grand peut-être que celui de Charlotte : il était, en tout cas, plus primesautier, plus naïf. Emily avait le don que les Anglais qualifient de génial. Dans l’ensemble des pièces publiées en commun par les trois sœurs, les plus remarquables sont celles qu’elle a faites. Toutes ont beaucoup d’élévation ; celles d’Emily seules ont de l’accent." Du seul ouvrage en prose d’Emily Brontë, de son roman Wuthering Heights, dont voici enfin une traduction française, M. Montégut disait : "D’un